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Festival de cinéma de DouarnenezAgenda/Actualités2013Newletter/Kezako Novembre 2013 • Retour sur la 36e édition du Fes...



Retour sur la 36e édition du Festival

Portant sur les Rroms, Tsiganes et Voyageurs, le 36e Festival de cinéma de Douarnenez s’est déroulé du 23 au 31 août dernier.

Mo Abbas fut l’un des invités. Il a mis les mains à la pate en animant des ateliers cuisine avec les enfants.

xtraits de sa lettre “Un gadjo à DZ“
[...] accueilli à l’aéroport de Brest [...]Avec Daniel et Anna-Vari nous échangions, des banalités ou des convictions, qui étaient souvent étrangement convergentes – comment l’oublier ? Et puis, j’aimais les écouter parler en breton tandis que nous partagions le repas. J’étais fasciné, littéralement dépaysé, voyageur dans un autre monde – il m’en faut peu, je fais d’ailleurs de très beaux voyages immobile… Daniel nous a donc expliqué que les termaji étaient des bohémiens qui se déplaçaient de village en village jusqu’au début du XXème siècle avec leurs lanternes magiques, « ancêtre » du cinéma et qui, en Bretagne, ont fini par prendre le nom de leur attraction – ainsi lanternes magiques s’est peu à peu transformé en termaji, terme qui désigne aujourd’hui les voyageurs de manière générale. L’histoire m’a plu ; et elle m’a d’autant plus interpellé qu’en argot algérien termaji désignerait plutôt un obsédé du fondement. Enfin…
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A Douarnenez, où l’on célébrait également le monde des sourds, les Trans et les Intersersexes, la Bretagne et la Roumanie, l’accueil chaleureux frisait l’insolence. Une utopie égalitaire et communautaire (je pèse mes mots) où la convivialité est à son apogée. Jérôme par exemple, qui nous a ouvert les portes de sa maison, face au port du Rosmeur, avant de nous laisser les clefs et de disparaître pendant 10 jours. Et quand je dis qu’il nous a laissé les clefs, c’est une image – en réalité la porte restait ouverte, même en nôtre absence, et ce n’était pas la seule dans ce cas… Pour un marseillais, c’était un vrai moment de respiration.
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Sous le chapiteau, en plus des autochtones chaleureux, il y avait des cinéastes, des dj, des poètes, des photographes, des cuisiniers, des peintres, des journalistes, des sociologues, des féministes, des trans, des anthropologues, des touristes pas pressés… Et les 280 bénévoles présents, entre autres, pour servir les 600 repas quotidiens sur la place du festival – un monde tel qu’il fallait faire la queue pendant des heures (parole de marseillais !) pour espérer obtenir un plateau repas (rillettes de sardines, purée de pois cassés, dahl et riz, poitrine ou palette, langoustines à la mayonnaise, saucisses-frites, lasagnes de légumes, poulet massalé, tomates farcies, sardines marinées, Kig Ha Faf… Sans parler des fondants au chocolat, des tartes au citron, des tiramisu au beurre salé et des fars aux pommes – j’étais aux anges !). Et ces files aux séances de cinéma, cette agora bondée pendant les débats, ces ateliers pour enfants pleins à craquer, toutes ces générations se tenant la main lors du fest-noz…
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Il y avait des « français voyageurs », qui étaient là en voisins pour raconter les tracasseries administratives dont ils étaient victimes – au point que, la polémique atteignant son apogée avec une histoire de barrière qui les empêche de rentrer et de sortir la nuit de
leur camp, les solidarités se sont exprimées publiquement et les autorités municipales acculées dans l’obligation de réagir. Résultat : la barrière a été enlevée – une victoire pour laquelle on a trinqué tous les soirs autour du bar à vin…
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Borka Vasic n’est pas une « française voyageuse » – elle est tsigane serbe, membre des Femmes en noir, un réseau féministe et antifasciste et elle lutte quotidiennement contre les démantèlements des quartiers informels en Serbie. Elle était présente sous le chapiteau pour un débat sur les femmes et le féminisme, ici aux côtés de Dolores Fernandez, pionnière du mouvement féministe gitan et fondatrice de ROMI.
Avec Dolores, nous avons partagé un temps l’appartement face au port du Rosmeur. Trois jours durant lesquels nous avons échangé des bribes de conversation avec mon espagnol approximatif – et des livres, de cuisine bien entendu – je lui ai dédicacé « Les périgrinations culinaires d’un gadjo » et elle un exemplaire de « Recetas de cocina » réalisé par le Centro de Educación Permanente Almanjáyar-Cartuja où Dolores est enseignante.
Ecouter ces femmes, à l’avant-garde de la lutte, m’a mis du baume au cœur ; et à toute l’assistance aussi, qui les a applaudies à tout rompre.
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Je me souviens de la profusion de livres à la librairie
Je me souviens des Lautari de Bucarest, qui ont animé un atelier de « découverte des instruments tsiganes » – cymbalum, violon, basse et accordéon.
Je me souviens de Mika, de sa voix, de son sourire brillant et des épices tchèques (Majoránka, paprika et kmín) qu’elle nous a offertes, un soir, pendant le repas.Je me souviens également du concert improvisé par le Taraf de Haidouks devant le café des Halles.
Je me souviens que les média nationaux brillaient par leur absence – c’était pourtant pour eux l’occasion de faire des rencontres et de questionner sérieusement le sujet, de faire des comptes-rendus, de dépasser les clichés et de coller à la réalité, de cesser de colporter les discours électoralistes des politicards incitant à la haine raciale et qui ne seront jamais condamnés pour ça – au lieu de ça, ces jours-ci, en une, on pouvait lire : « Horrible ! Trafic de bébés roms à Marseille ! ». Honte à eux, honte à nous… Eh ! Camarade Rom ! Tu es plus que le parfait bouc-émissaire ! Tu es la victime idéale ! Haineux et compatissants jettent en pâture ta prétendue histoire à la télé, dans les journaux, à la radio (que de semaines Roms sur France Culture !), sur le net… On ne parle plus que de toi, comme si tu étais le diable incarné ou la huitième merveille du monde, c’est selon. Mais toi, tu dis quoi ?
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